Édito
01/02/2011

La fin de vie, une histoire répétitive sur une question si difficile…

Claudine Bergoignan Esper, professeur des universités à la faculté de droit Paris-Descartes

Le débat divise toujours autant. Lors du dépôt récent, rapidement avorté, d’une proposition de loi tendant à autoriser l’aide active à mourir, il a repris avec vigueur. Ce n’est là qu’un début. L’examen de la prise en charge, en toute dignité, des personnes âgées et dépendantes est susceptible de le relancer. Il en est de même de la campagne politique majeure qui aura lieu en 2012. Pour ce difficile et lancinant problème, rien n’est plus mauvais qu’une discussion dans l’urgence, liée à une situation humaine douloureuse. Il est indispensable d’étudier la question de manière responsable et dépassionnée, avec une écoute forte des uns et des autres, en toute liberté et indépendance. D’ores et déjà, les arguments majeurs sont connus. D’un côté, les tenants du développement actif des soins palliatifs et du refus de tout acharnement thérapeutique se prononcent contre une évolution législative. De l’autre, les partisans d’une légalisation de l’euthanasie volontaire font valoir la thèse de la liberté de choix de la personne et du respect absolu de la volonté de chacun.
C’est là un indispensable débat de société, sur lequel nulle influence politique ne devrait jouer. Ce débat fait appel au plus profond de l’intime de chacun de nous. On ne rappellera jamais assez les conditions de l’adoption exemplaire de la loi du 22 avril 2005, relative aux droits des malades et à la fin de vie. Précédée par le travail d’une mission d’information composée de parlementaires toutes formations confondues, elle a été l’objet d’un vote consensuel et unanime à l’Assemblée nationale.
Mais avant tout… il est profondément choquant que cette loi de 2005 n’ait été suivie ni de l’information ni des mesures nécessaires à son application. Ainsi, la personne de confiance est quasiment inconnue des professionnels de santé comme des citoyens. Il en est de même des directives anticipées. Ces mesures permettent pourtant à toute personne d’exprimer sa volonté sur sa fin de vie. Jamais aucune initiative n’a été prise par les pouvoirs publics pour les faire connaître.
Les dispositions de la loi du 22 avril 2005, permettant l’arrêt de traitement lorsque le patient est en phase avancée d’une affection grave et incurable, et consacrant l’alternative des soins palliatifs, restent inconnues de la plupart des professionnels médicaux. L’évaluation de l’application du texte, réalisée en 2008, l’a établi.
Il sera certes toujours utile de débattre de notre volonté d’aller plus loin dans la législation. Mais, au préalable, appliquons enfin ce qui existe déjà. L’année 2011 est annoncée comme l’année des droits des patients. Faisons en sorte de permettre que les mesures en place, touchant à une fin de vie digne et dont la valeur est reconnue par tous, s’appliquent dans notre pays.