Le Comité éthique et cancer

 

Définition(s) de l’éthique

La définition philosophique de l’éthique est l’interrogation sur « la vie bonne » dans le sens d’Aristote, c’est-à-dire sur la manière dont il convient d’agir au mieux, associée à l’exigence de spécifier les valeurs au nom desquelles a été arrêté le choix de l’action.  Dans le domaine biologique et médical, cela revient en général à évaluer la compatibilité entre un nouveau pouvoir sur l’homme et le respect de ses droits et de sa dignité. Le domaine spécifique de l’éthique est celui qui, du fait de sa nouveauté, ne fait l’objet ni de lois, ni de la jurisprudence, ni de la déontologie.  Il s’agit  le plus souvent  d’une question en tension, c’est-à-dire à laquelle plusieurs réponses peuvent-être apportées, répondant les unes et les autres à des logiques morales contradictoires. Or,  parce que l’éthique est une morale de l’action, il  convient de faire un choix et d’en expliquer les motivations, à savoir les valeurs jugées supérieures qui ont été privilégiées en la circonstance.

Historique du Comité éthique et cancer

Pendant plusieurs années, l’approche éthique du cancer dans toutes ses dimensions est restée circonscrite aux réflexions menées par le groupe éthique de la Ligue contre le cancer initié par la cancérologue Françoise May-Levin et présidé par le généticien Axel Kahn. Dans une volonté d’élargir  ces réflexions d’abord aux personnes concernées mais aussi au grand public, un colloque réunissant près de 700 participants à la cité des sciences et de l’industrie de La Villette le 14 février 2008 a permis d’ouvrir un large débat entre d’une part des professionnels de la santé et des sciences sociales, d’autre part  les patients et leur entourage. Cette date a été un moment important et inédit de la lutte contre le cancer dans toutes ses dimensions ; il a conforté le groupe de réflexion éthique dans son  intention de se constituer en instance pouvant être saisie par toute personne concernée.
Installé le 19 septembre 2008 par la Ministre chargée de la Santé, madame Roselyne Bachelot-Narquin, le Comité éthique et cancer est un dispositif consultatif de réflexions qui émet de façon collégiale  des avis publics sur les questions dont il est saisi ou se saisit lui même.
La Ligue contre le cancer est à l’origine de la création du Comité éthique et cancer. Elle lui assure les moyens de son fonctionnement. Le Comité éthique et cancer est cependant une structure indépendante dans les réflexions qu’il mène et les avis qu’il rend.

Mission du Comité éthique et cancer

L’éthique, une réflexion conséquence des progrès scientifiques

Le grand défi lancé aux mondes médical et associatif est d’améliorer la prise en charge et le traitement du cancer, donc d’aider les malades et leurs familles. Heureusement, les progrès scientifiques et techniques modernes leur donnent des moyens inédits de relever un tel défi. Cependant, l’efficacité médicale pose elle-même des questions nouvelles, certaines d’entre elles d’ordre éthique, c’est-à-dire n’entrant ni dans les règlements juridiques, ni dans le cadre déontologique. Ces questions doivent être traitées par une communauté de praticiens, de chercheurs et d’utilisateurs : personnels médicaux et paramédicaux, philosophes, sociologues, psychologues, juristes, associations, personnes malades et leurs familles ou leurs proches.

Des cas concrets

Comment assister une famille sans trahir le secret professionnel ? Cancer incurable : que dire à une famille ? La violence exercée par un patient peut-elle justifier l’interruption de sa prise en charge ? Comment concilier la demande d’espoir des patients en situation métastatique avec l’absence de résultats des traitements ? Telles sont certaines des questions que se pose aujourd’hui le Comité éthique et cancer inauguré en 2008. Nombre d’entre elles impliquent directement les usagers de santé, leur entourage et les professionnels de santé.

Fonctionnement et limites

Le Comité éthique et cancer est un organe consultatif qui peut être saisi à tout moment par toute personne physique ou morale sur toute question d’ordre éthique en relation avec la pathologie cancéreuse (voir Saisir le Comité éthique et cancer). Il peut également s’autosaisir. Depuis 2008, il répond à toute saisine éthique sans pour autant se substituer aux personnes qui portent la responsabilité de la décision en émettant des avis et des recommandations. En effet, le rôle du Comité éthique et cancer se limite à analyser, approfondir, clarifier les éléments de la décision médicale en faisant appel à une réflexion collégiale transdisciplinaire, il s’efforce de répondre aux interrogations des personnes malades et de leurs familles, des personnels engagés dans le soin ou dans les activités de santé publique. Il s’agit d’un dispositif consultatif d’aide à une décision médicale difficile, laquelle se situe ici dans un conflit de valeurs, dans une situation d’incertitude. Le Comité éthique et cancer n’a aucune prérogative décisionnelle et ne se substitue pas aux personnes qui portent la responsabilité de la décision, pas plus qu’il n’engage un travail de médiation ou de conciliation.

Les travaux du Comité sont une occasion pour :

À partir des questions reçues, identifier les problèmes éthiques rencontrés par les personnels soignants, les malades, leurs familles ou leurs proches et la population ;
- Favoriser la réflexion sur le sens du soin ;
- Émettre des avis ou recommander des orientations générales à partir d’études de cas ou de questions empiriques ;
- Constituer un corpus de réflexions sur les questions éthiques en cancérologie ;

Le mot du président

“Le Comité éthique et cancer a été présidé par Axel Kahn de 2008 à 2019, puis par Claudine Esper, personnalité éminente du droit de la santé, de 2019 à 2023. J’inscris mes pas dans les leurs avec l’ambition — partagée avec la Dr Christine Raynaud, vice-présidente — de pérenniser le comité, de l’ouvrir encore davantage vers les acteurs de la cancérologie : malades et proches, associations du cancer et « ligueurs », médecins et chercheurs, établissements et administration, citoyens et politiques.

Et de contribuer, à notre mesure, à développer la réflexion et la vigilance éthiques comme composantes essentielles de l’action et de la décision dans le champ de la santé.”

Philippe Amiel, président du Comité éthique et cancer