Édito
01/10/2012

Éthique, droits et prison

Axel Kahn, président du Comité éthique et cancer

Le Comité éthique et cancer réunit 34 personnes impliquées dans les pratiques et (ou) les réflexions concernant ces maladies et ce qu’elles signifient pour les patients, leurs familles, les soignants et la société. L’objet de leurs travaux est la dimension éthique de ces questions, c’est-à-dire la qualification des comportements et des actes au regard de la notion d’action bonne – ou la moins mauvaise – en référence à des valeurs explicites partagées. Il ne peut exister en cette matière d’expertise « positive » mais seulement d’avis, c’est-à-dire d’opinions reposant sur le travail collectif du Comité tenu d’expliciter ce qui motive son point de vue et le conduit à l’avis adopté. Ce dernier se veut une contribution à la réflexion propre des auteurs des saisines et, de façon plus large, de tous ceux confrontés à des problèmes similaires. La contrepartie de cette dimension strictement consultative et en aucun cas normative des travaux du Comité est sa totale indépendance, condition de sa crédibilité et de son utilité pour toute la communauté du cancer.
La plus récente des saisines étudiées par le Comité est emblématique des principes qui fondent ses analyses et de son mode de fonctionnement. Il s’agissait d’un cas où la tumeur rapidement évolutive d’un jeune patient incarcéré avait sans doute été découverte avec un certain retard, peut-être imputable à la privation de liberté. Le Comité n’était pas habilité à mener une enquête sur ce cas particulier, il n’en avait pas les moyens. En revanche, il a abordé de façon plus large la question du risque d’une « perte de chance » d’être soigné de façon optimale dans ces conditions. Le Comité a commencé par rappeler avec force que la privation de liberté laissait entiers tous les autres droits du détenu, dont celui d’avoir le même accès aux services de santé que s’il n’était pas incarcéré. Des responsables de l’administration pénitentiaire et des défenseurs des droits des détenus ont été longuement auditionnés par un groupe de travail ad hoc qui a en conséquence présenté un rapport devant le Comité plénier. Un projet d’avis circonstancié  a été rédigé et soumis pour remarques aux experts entendus.
Après prise en compte d’observations factuelles compatibles avec les travaux du Comité plénier, un avis définitif a été rédigé, reproduit dans ce numéro du bulletin Éthique et cancer. Il exprime l’opinion collective, informée et de bonne foi des membres du Comité, il est bien entendu possible d’y faire des objections. Ces dernières sont elles aussi fidèlement rapportées dans ce numéro.