Édito
01/03/2010

Légitimer l’éthique comme principe de la conscience humaine

Laurent Pointier, rédacteur en chef du bulletin Éthique et cancer

Quelle information donner à un malade pour qui le cancer se chronicise ? Quand doit-on informer un patient de son droit à formuler des directives anticipées ? Que dire à une famille souhaitant poursuivre l’anesthésie du père dont le cancer est incurable ? Telles sont les situations sur lesquelles le comité éthique et cancer a eu à se prononcer ces derniers mois. Certaines réponses ou avis relèvent à la fois de l’empirisme, du bon sens et de la loi. Pour d’autres, il se révèle indispensable de connaître les motivations et les parcours de vie, de soupeser les émotions ou d’appréhender les douleurs. La multiplicité et la complexité des cas étudiés jusqu’ici par le comité éthique et cancer justifient la pluridisciplinarité et la nécessaire complémentarité du collège de 35 experts le composant.
À certains avis rendus, il pourra être opposé un jugement sévère sur leur éventuelle conclusion évidente. La sanction serait gratuite. L’éthique ne revendique pas être une science exacte qui, par le biais de théorèmes alambiqués, conclurait à une réponse absolue. Elle en est l’exact contraire puisqu’elle a pour leitmotiv d’émettre des orientations qui ne recherchent pas le consensus mais qui rendent compte des antagonismes existants. Les avis rendent donc compte avec justesse et subtilité des difficultés auxquelles peut être confronté un groupe aux disciplines et aux sensibilités variées.
Il n’existera donc pas de moment idéel pour informer un patient de son droit à formuler des directives anticipées. Les uns seront partisans de l’information précoce parce qu’elle pourrait notamment être moins difficile à recevoir pour le patient dont la fin de vie n’est pas encore envisagée. Les autres délégitimeront cette annonce précoce parce qu’elle pourrait être mal vécue par le patient à qui on vient déjà d’annoncer un cancer.
Si l’on attend de la réflexion éthique qu’elle aboutisse à des orientations, celles-ci doivent être suffisamment malléables pour épouser les contours du cas spécifique étudié qui, s’il est exceptionnel, sera un cas de conscience toujours unique.