Saisine n°25

du 10 juin 2014

Fin de vie : non-malfaisance et respect de la volonté d’un patient jugé incohérent

Saisine discutée

lors de la 17ème session plénière du Comité éthique et cancer du 15 avril 2013

Personne(s) auditionné(es)

Laurence Boehler, Lucie Mira et Stéphanie Orjubin, service soins de support / soins palliatifs, clinique St-Jean de Melun

Rapporteur(s)

Patrick Gaudray et Daniel Oppenheim

Membres du groupe de travail

Philippe Amiel, Jean-Michel Belorgey, Mario di Palma, Claudine Esper, Christiane Étévé, Michèle Meunier-Rotival, Catherine Vergely

Descriptif saisine

M. G. est un patient de 84 ans, atteint d’un cancer prostatique avec métastases osseuses diffuses traité par hormonothérapie et radiothérapie antalgique (de D3 à D9) avec une légère amélioration sur le plan de la douleur. Il a été rapidement hospitalisé, le maintien à domicile n’étant pas compatible avec son isolement. Il a alterné entre phases de très grandes fatigues, laissant craindre le pire aux équipes, et phases de récupération. D’aspect robuste et à l’attitude décidée, il semblait peu soucieux de la dégradation de son état, voir détaché.
M.G est atteint d’une escarre sacrée très importante renvoyant l’image d’un corps usé qui se décharne, mais dont il ne se plaint pas. Malgré la douleur, il ne formule pas de demande d’aide et refuse les soins et les propositions d’antalgiques. M. G. est devenu rapidement incohérent (avec des hallucinations) et la communication avec lui est désormais difficile. Pour l’équipe de la prise en charge de la douleur se pose alors la question de savoir comment être au plus près de l’intérêt du patient.
Soulager son agonie reviendrait à décider de mettre un terme à son combat, déniant ainsi sa capacité de résistance. Apaiser sa souffrance pourrait être envisagé comme une façon de lui éviter de formuler une demande d’aide, blessante d’un point de vue narcissique. Dans ce contexte particulier, serait-il envisageable de ne pas informer le patient de l’administration d’une sédation (impliquant le risque de précipiter la survenue de la mort) ? Mais intervenir par une sédation n’irait-il pas à l’encontre de sa remarquable combativité et de sa volonté d’exister encore, malgré la souffrance physique ?
Les postulats éthiques que sont la non-malfaisance et le respect de la volonté du patient apparaissent dans ce cas comme deux valeurs opposées, à la mesure du clivage probable du patient entre soma et psyché.